Vers une privatisation de la communication européenne ?

Qu’il s’agisse du recours de plus en plus systématique aux prestataires privés pour des missions de communication, de la généralisation d’un langage inspiré par le business ou de la « managérialisation croissante des affaires européennes » autour « d’un marché de l’expertise informationnelle », la privatisation de la communication européenne devient sans cesse une réalité plus tangible…

Structuration d’un marché des experts de l’information européenne

Première indication de la privatisation de la communication européenne, la structuration de plus en plus importante d’un marché bruxellois d’experts de l’information européenne – parfaitement décrit par Philippe Aldrin dans « Producteurs, courtiers et experts de l’information européenne. Sociogenèse d’un champ professionnel dans le monde des affaires européennes ».

Pour Philippe Aldrin, « s’est ainsi imposé un marché de l’expertise stratégique sur les façons de mieux penser les politiques européennes et, aussi, « mieux communiquer l’Europe » ; un marché où s’abolissent les distinctions fonctionnelles entre journalistes, conseillers, experts et lobbyistes ».

A l’heure de la complexification de la construction européenne, un petit monde de « producteurs, courtiers et experts de l’information européenne » se déploie au sein duquel « les compétences professionnelles de ces prescripteurs des cadres perceptifs et interprétatifs des politiques publiques et de la gouvernance européennes ne sont plus différenciées qu’en fonction de la nature du commanditaire qui les emploie ».

Systématisation de la sous-traitance des missions de communication européenne

De plus en plus systématiquement, faute de disposer des ressources humaines et des compétences techniques au sein des institutions européennes, des appels d’offre publics pour des missions de communication européenne organisent peu à peu un véritable marché de prestataires spécialisés.

Le marché de la communication de la Commission européenne apparaît – selon les chiffres disponibles datant de 2011 – comme relativement concentré avec 3 agences – toutes basées à Bruxelles – représentant chacune environ un quart des 100 millions d’euros « privatisés » pour la communication de l’UE.

Généralisation d’un discours sur l’Europe inspiré par le business

Dernière tendance confirmant la privatisation croissante de la communication européenne, la généralisation d’un discours inspiré par le business au sein même des acteurs institutionnels européens.

C’est le consultant indépendant, inventeur du concept de « nation branding » Simon Anholt qui indique récemment lors de la conférence EuropCom cette prégnance de concepts hérités de la stratégie militaire et du business : persuader des cibles, aligner les parties prenantes, délivrer un message unique.

Au total, le mouvement de privatisation dans les esprits et dans les actes de l’information et de la communication européennes n’est pas sans conséquence sur les partis-pris qui dominent actuellement la communication de l’UE.

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