Archives mensuelles : août 2012

Quelles sont les principales campagnes de communication de la Commission européenne en 2012 ?

Entre les anniversaires et les thèmes imposés par la crise, les principales campagnes de communication de la Commission européenne pour 2012 sont présentées dans le rapport sur la stratégie « Communiquer sur l’Europe pour les citoyens et les médias »…

Dans un contexte de crise, communiquer sur « un message positif sur la croissance économique »

La direction générale des entreprises et de l’industrie prévoit d’engager des actions de communication au sujet des PME, acteurs incontournables pour la croissance et l’emploi, autour de l’écologisation de leurs activités et surtout des aides européennes qui leurs sont destinées :

  • une remise des Prix européens de la promotion de l’esprit d’entreprise ;
  • une campagne de sensibilisation afin de familiariser les PME avec les services d’aide disponibles ;
  • une campagne d’information à destination des entreprises concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales.

Dans un contexte de crise, communiquer sur la politique de cohésion entre les Régions européennes

La stratégie de communication de la direction générale de la politique régionale consiste à promouvoir la politique de cohésion. Les actions de communication portent sur la représentation des principaux atouts et succès de la politique de cohésion de l’UE, s’agissant en particulier de sa contribution à la croissance et démontreront la valeur ajoutée de cette politique, en aidant les régions à sortir plus fortes de la crise.

Plusieurs événements organisés en 2012 :

  • la cérémonie de remise des prix RegioStars (5e anniversaire), le 14 juin 2012 ;
  • les Open Days de 2012 (10e anniversaire), du 8 au 11 octobre 2012.

20e anniversaire du marché unique, communiquer sur « les espoirs pour l’avenir et le potentiel de croissance »

Les principales initiatives prévues par la direction générale Affaires économiques et financières sont :

  • une campagne « Génération 1992 » (generation1992.eu) destinée à donner aux jeunes adultes nés en 1992 l’occasion d’exprimer leur point de vue sur le marché unique dans le contexte d’un concours ;
  • une série de cinq séminaires pour les journalistes qui porteront sur le marché unique et les grandes priorités de l’Acte pour le marché unique en matière de renforcement de la croissance ;
  • une Semaine du marché unique organisée en octobre 2012 dans les États membres sous la conduite des autorités nationales et le soutien des représentations de l’UE.

Année européenne du vieillissement actif, communiquer sur l’emploi, la participation et l’autonomie des séniors

Gérée par la direction générale de l’emploi, l’année européenne constitue une importante action de communication en 2012. Trois dimensions du vieillissement actif seront particulièrement abordées: le vieillissement actif et l’emploi, la participation à la société et la vie autonome.

25e anniversaire d’Erasmus, communiquer sur l’impact positif exercé sur la vie professionnelle et privée des étudiants

En 2012, la direction générale de l’éducation et de la culture célèbre le 25e anniversaire d’Erasmus : « Erasmus change les vies et ouvre les esprits depuis un quart de siècle », avec une grande conférence à Copenhague, en avril, et des activités entourant la Journée de l’Europe dans les États membres.

PAC, communiquer sur la réforme comme la réponse apportée aux besoins de la société

La direction générale de l’agriculture et du développement rural axera sa campagne de communication sur la politique agricole commune, avec trois objectifs et trois groupes-cibles: informer les médias et autres relais d’opinion sur la réforme de la PAC; mobiliser les décideurs en faveur de la PAC après la réforme de 2013; sensibiliser l’opinion publique à la réponse apportée par la PAC aux besoins de la société.

Quand bien même ces campagnes de communication seraient visibles auprès des Européens – ce qu’on peine à croire – la Commission européenne, au cours de l’année 2012, sera-t-elle audible avec de tels messages ?

Ambiguïtés de la campagne de communication « Je veux l’Europe »

Envoyer « un signal positif pour une Europe forte », c’est le défi revendiqué par la campagne de communication «Je veux l’Europe» (« Ich will Europa »: ich-will-europa.de) annoncée dans la stratégie du ministère fédéral des Affaires étrangères et lancée récemment en TV, presse et sur Internet par onze fondations allemandes. Selon l’intention que l’on prête à la campagne, la perception s’en trouve radicalement changée…

Intention réduite, perception partisane décuplée : instrumentalisation efficace des enjeux européens à des fins électorales

La campagne « Je veux l’Europe » peut être perçue comme un exercice de politisation de la question européenne parce qu’« Angela Merkel s’est chargée elle-même du discours de bienvenue de cette campagne de communication », selon Le Figaro qui constate que « la chancelière ne se contente pas de proclamer son attachement, elle veut aussi faire avancer son projet d’intégration européenne ».

Le message de la campagne dont le slogan est « Je veux l’Europe », vendue avec une vidéo de Merkel risque d’être compris comme « Je veux l’Europe de Merkel », ce qui ne peut que susciter des interrogations sur les intentions relatives aux impressions laissées auprès du public par cette campagne pro-européenne, selon Lost in Europe qui précise que Berlin se prépare pour les élections générales.

D’ailleurs, Lost in Europe confirme que « la politique intérieure est le poison de la campagne tout entière : le plan original était que l’ancien ministre des Affaires étrangères Fischer soit impliqué avec son successeur et actuel titulaire du poste Westerwelle ». Mais, cette campagne très louable pour l’Europe fut perçue par certains comme une « campagne pour Westerwelle ».

Intention ambitieuse, perception européenne étriquée : promotion hasardeuse d’une idée européenne brouillonne

A contrario, la campagne « Je veux l’Europe » envisagée comme « une déclaration d’amour à l’Europe (…) parrainée par le président allemand Joachim Gauck (…) sous la bannière bleue étoilée de personnalités, dont le capitaine de l’équipe de football d’Allemagne Philipp Lahm ou le patron d’EADS Thomas Enders », selon Le Figaro, peut également être perçue comme un exercice de promotion hasardeux d’une idée européenne brouillonne.

Brouillonne, la confusion créée autour du message, mélangeant les visions et les opinions quant à l’avenir de la construction européenne. Hasardeux, le choix d’une campagne très institutionnelle « 1.0 » qui s’appuie sur des personnalités du monde du sport, de la culture, de la politique ou de l’économie alors que c’est l’opinion des citoyens « de base » qui vacille sur l’Europe.

Selon la dépêche AFP, « dans un sondage publié par le journal dominical Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung à la mi-août, seule la moitié des Allemands (50%) se disait favorable à un maintien dans la zone euro en cas de référendum sur le sujet ». Une campagne plus interactive et participative aurait été plus adaptée pour laisser les doutes s’exprimer et se lever par la discussion.

Ainsi, l’ambiguïté de la campagne de communication « Je veux l’Europe » risque d’en limiter les résultats.

L’initiative citoyenne européenne, la plus importante innovation pour la communication européenne ?

Inauguré au cours du premier semestre 2012, l’initiative citoyenne européenne qui donne un droit d’initiative politique à condition de réunir au moins un million de citoyens de l’UE, représente-t-elle la plus importante innovation de la communication européenne ?

L’initiative citoyenne européenne relance la réflexion sur la bonne approche de la communication européenne

Cette innovation introduite dans le traité de Lisbonne est une occasion de renouveler le débat sur le diagnostic de la communication de l’UE :

Pour les tenants d’une approche pédagogique, il faut lancer une communication promotionnelle de l’initiative citoyenne européenne auprès du grand public pour combler le « déficit démocratique », réduire le « fossé entre l’UE et les citoyens » et compléter la démocratie représentative par la démocratie participative. Il s’agit de recycler une vieille rhétorique qui au fond de l’initiative citoyenne européenne que le problème de la communication de l’UE (et de la gouvernance européenne) résiderait seulement dans un manque de connaissance et de participation des citoyens.

Pour les tenants d’une approche technocratique, il faut faciliter l’appréhension et l’adhésion de l’initiative citoyenne européenne par les publics spécifiques de l’UE. Là, c’est une rhétorique, qui en invoquant de grands principes tels que la « société civile européenne » et l’« espace public européen », se révèle en fait comme un moyen de confier une nouvelle légitimité aux « petits entrepreneurs de la cause européenne », capable d’exploiter leur « capital social européen ».

Entre un pis-aller de la participation des citoyens à la construction européenne ou comme un canal d’expression technocratisé spécialement réservé aux « insiders » du système européen, l’initiative citoyenne européenne est un objet théorique non identifié.

L’initiative citoyenne européenne renouvelle la réflexion sur les mobilisations collectives européennes

Au-delà des deux formes d’action collective européenne : le lobbying et la protestation que Didier Chabenet identifie dans son article « Vers une européanisation de l’action collective », l’initiative citoyenne constitue un scénario inédit d’européanisation des actions collectives.

Une forme inédite de lobbying, au sens ou le détenteur du pouvoir des initiatives citoyennes européennes est ambiguë :

  • un nouveau pouvoir pour instrumentaliser les citoyens entre les mains de la Commission européenne ?
  • un nouveau cauchemar dans la société civile pour organiser l’expression des citoyens ?

Une forme inédite de protestation, au sens où l’activation des « players » européens sur des initiatives citoyennes européennes ne peut pleinement se réaliser sans le support des institutions européennes :

Ainsi, l’initiative citoyenne européenne se révèle une innovation institutionnelle féconde pour repenser la communication européenne. En sera-t-il autant dans la pratique ?

Quel bilan pour l’événement blogueur de la présidence chypriote du Conseil de l’UE ?

Organisé au milieu de l’été, l’événement présenté comme « la présidence chypriote [du Conseil de l’Union européenne] rencontre les bloggeurs » aurait rassemblé, selon le « communiqué de presse » (sic) 37 blogueurs chypriotes et de toute l’Europe.

Destiné à promouvoir l’interaction entre la communauté chypriote et la blogosphère européenne et à réunir physiquement et virtuellement ensemble des blogueurs européens, le hashtag #cy2012eublogs aurait été utilisé pendant la journée dans 695 tweets, toujours selon le « communiqué de presse ».

Selon le regard porté sur l’événement blogueur, le résultat est plus ou moins abouti

Sous l’angle de l’organisation, « techniquement », l’événement « une réunion-dialogue plus qu’une conférence « s’est déroulé avec une globale satisfaction tant pour les bloggeurs (hormis les tables rondes retransmises uniquement via Google+ Hangouts) qu’auprès des représentants officiels chypriotes – « le représentant adjoint de Chypre au Conseil de l’Union européenne, George Zodiates clôture la réunion (..) expose son incompétence dans le domaine du web, annonce qu’il ne connait le mot « blogosphère » que depuis quelques heures : mais toutefois lui-même a pris conscience non seulement de l’officialisation des blogs dans le domaine de l’information, mais aussi de leur importance en tant que média démocratique », selon Au café de l’Europe.

Sous l’angle de la signification, « symboliquement », l’événement est interprété avec une relative confusion dans les médias – la « Famagusta Gazette , «  indique qu’il s’agit de la première réunion officielle de la blogosphère européenne avec une présidence du Conseil de l’UE » – ce qui n’est formellement pas le cas puisque la présidence hongroise avait accrédité des eurobloggeurs à des réunions officielles du Conseil. N’en demeure pas moins que l’événement prouve que l’UE semble consciente de l’importance des médias sociaux et de la montée de l’euro-blogosphère afin de créer une meilleure compréhension de l’UE auprès des citoyens.

Sous l’angle des conclusions, l’événement est étudié avec une unanime réserve :

Dans « Lessons learnt? », Eric tire plusieurs leçons, notamment que « ce ne sera pas suffisant pour rétablir la confiance ; l’UE doit tendre la main aux citoyens et cesser d’utiliser les médias sociaux comme un canal unidirectionnel pour les messages anciens.

Dans « Will the Cyprus blogging event #cy2012eublogs leave a legacy? », Ralf voit certes « le succès en relations publiques » mais attend surtout « des mesures concrètes pour se connecter et interagir avec les citoyens ». D’ailleurs, il souligne que « le programme de la présidence est traditionnel et paternaliste à l’égard de citoyens de l’UE. (…) En bref, les blogueurs doivent être, implicitement, les agents volontaires pour passer le mot sur les bonnes actions au sein de la population ».

Paradoxe d’un événement blogueur inabouti

Finalement, le paradoxe de cet événement bloggeur, c’est qu’il n’a pas donné le sentiment que la présidence chypriote l’ait effectivement vu comme une opportunité pour s’engager davantage dans les médias sociaux. La conversion « sociale » des officiels chypriotes n’a pas eu lieu – au-delà de leurs déclarations d’intention à ne pas négliger pour autant.

Les intentions chypriotes étaient très ambitieuses, mais faute d’une pleine appréhension de la culture du « blogging », l’événement peut soulever de l’incompréhension entre ces mondes et risque de générer en retour de la frustration, voire la crainte d’une instrumentalisation.