Faut-il un Commissaire européen à la communication ?

Le débat sur la place qu’il convient d’accorder à la communication au sein de la Commission européenne est relancé aujourd’hui avec la publication d’un court billet de Martin Westlake (en anglais) : « Communicating Europe ». Quels sont les arguments des « pros » et des « antis » Commissaire à la communication ?

Pour les antis : la communication de l’UE n’étant pas une politique, un Commissaire n’est pas nécessaire

Ce point de vue est défendu notamment par Cédric en rebond de mon interview dans Le Taurillon, que je reproduits intégralement : « La communication n’est pas une politique mais un outil. Par conséquent, l’idée d’un commissaire dédié à la communication, ou encore l’idée d’un chapitre « communication » dans le programme politique annuel de la Commission, sont des hérésies. L’UE en tant qu’institution ne devrait pas communiquer, mais promouvoir des valeurs, promouvoir le débat. Les mots importent. Une institution qui assume le mot « communiquer » est suicidaire, elle donne à ses adversaires l’occasion rêvée d’une accusation de propagande. C’est aux politiques (politiciens) européens de communiquer. Communiquer est pour eux une nécessité personnelle quotidienne, pour accéder au pouvoir ou s’y maintenir. »

Ne partageant pas cet argument, je considère qu’il est primordial d’articuler de manière optimale communication des institutions européennes et communication des responsables politiques européens, mon billet d’hier « Pour une communication européenne à la fois institutionnelle et politique » précise ces deux registres :

  • approche institutionnel devant se limiter à son champ d’intervention sur le long terme ;
  • approche politique devant pleinement prendre possession de son terrain d’expression quotidienne.

Pour les pros : l’UE a besoin d’une politique de communication stratégique, un Commissaire est indispensable

Ce point de vue est défendu de manière paradoxale par Martin Westlake, puisqu’il s’appuie sur une tribune d’Alastair Campbell portant sur le conflit en Afghanistan pour en appliquer les arguments à l’Union européenne.

L’argument de base d’Alastair Campbell est que, « tandis que les soldats peuvent gagner des guerres, l’échec dans la bataille des cœurs et des esprits peut les perdre. » Il tire trois leçons du conflit en Irak qu’il invite à prendre en compte dans celui en Afghanistan :

  • d’abord, « il faut prendre au sérieux la stratégie de communication » ;
  • ensuite, « dans une alliance multinationale, il faut internationaliser la communication » au sein des différents systèmes politiques nationaux ;
  • enfin, « il faut porter une attention constante sur la consistance des arguments ».

Appliquée à l’Union européenne, la réflexion montre l’importance d’une politique de communication stratégique et consistante, portée par un Commissaire dédié, permettant à l’UE de lui faire prendre toute sa place dans les médias avec ses propres arguments.

Ainsi, la décision de José Manuel Barroso de ne pas attribuer de portefeuille à la communication au sein du Collège des Commissaires fait l’objet de vifs échanges, qui devraient connaître d’autres rebondissements…

Une réflexion sur « Faut-il un Commissaire européen à la communication ? »

  1. Cédric

    Bonjour,

    Mon post n’était pas très clair. Je pense que vous avez tout à fait raison, la Commission a besoin d’une stratégie de communication. Mais celle-ci doit :
    – être portée par Barroso lui-même, pas par un sous-commissaire,
    – viser à promouvoir la politique de la Commission, ses positions, son action, et non pas "promouvoir l’Europe". Prétendre promouvoir l’Europe est inutile et à double tranchant,
    – être mise en oeuvre par le niveau politique, par les Commissaire eux-mêmes, pas par les petites mains de la Commission (ex : contractuels des représentations de la Commission dans les 27).
    – passer par les média de masse, pas par les média experts de l’UE.

    Pour résumer : j’ai vu Barroso une fois sur une grande chaîne francaise. C’était en novembre, sur C+, Denisot était ravi de l’accueillir mais a vite souligné "on ne vous voit pas souvent à la télé". Les gens étaient tellement étonnés de l’avoir sur le plateau qu’ils lui ont servi des questions surréalistes du type "A quoi servez-vous ?".

    Sarko, à l’inverse, je le vois tous les jours à la télé. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que sa communication marche mieux que celle de la Commission.

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