Conférence « l’Europe, c’est qui ? » à l’institut néerlandais de Luuk van Middelaar, auteur de « Passage à l’Europe : histoire d’un commencement »

Alors que les Français parlent de « construction européenne », les Anglais d’« intégration européenne » et les néerlandais de « coopération européenne », le fait européen – vingt ans après la chute du mur de Berlin – est indéniable.

Auteur de « Passage à l’Europe : histoire d’un commencement », voir la critique de cette thèse sur Nonfiction, Luuk van Middelaar était invité, mardi 29 septembre par l’institut néerlandais, à répondre à l’interrogation apparemment simple : « L’Europe, c’est qui ? »….

« Qui est-ce qui peut parler au nom de l’Europe ? »

Déjà en 1876, Bismarck notait « qui parle Europe à tort (…) j’ai trouvé le mot Europe dans la bouches des politiciens qui demandaient des concessions étrangères… ». Aujourd’hui, en est-il vraiment autrement ? Certes, des décisions sont prises au nom de l’Europe. Mais, les prétentions à parler au nom de l’Europe finissent souvent dans la « cacophonie », que l’on songe juste aux positions des Européens lors des conflits yougoslave ou irakien. Alors, l’Europe est-elle condamnée à demeurer un concept vide ?

« L’Europe, c’est des sphères concentriques formant une identité »

La « sphère externe de l’Europe » est délimitée par la géographie et l’histoire du « continent » :

  • y domine le discours intergouvernemental des États-nations ;
  • y règne le « concert européen », fait de jeux diplomatiques et de conflits militaires.

La « sphère interne de l’Europe » est définie par les traités instituant la « communauté » :

  • y domine le discours supranational des organes communautaires ;
  • y règne l’« esprit d’avant-garde », fait de visions intégrationnistes et de convictions fédéralistes.

La « sphère intermédiaire de l’Europe » est découverte par le « club » des États membres de l’Union, défini d’abord par les autres qui veulent y entrer et ensuite par le poids des responsabilités face à l’élargissement :

  • peu à peu émerge une « voix de l’Europe » lors des Conseils européens rassemblant les chefs d’Etat et de gouvernement ;
  • peu à peu émerge une « incarnation du corps politique de l’Europe » avec la présidence du Conseil de l’UE, exercée successivement tous les 6 mois par un chef d’Etat et de gouvernement.

Ainsi, progressivement, par la participation des autorités politiques nationales à la sphère intermédiaire, l’Europe, il faut s’en convaincre, c’est aussi nous, c’est notre identité.

« En sommes-nous au Moyen-âge de l’Europe, au moment de la naissance du purgatoire ? »

Proposant une métaphore religieuse :

  • la sphère externe serait l’enfer, l’Europe des intérêts, des guerres et de la Shoah ;
  • la sphère interne serait le ciel, l’Europe harmonieuse, unie, rêvée par les Pères fondateurs ;
  • la sphère intermédiaire serait le purgatoire, l’Europe désillusionnée, mais réelle et concrète.

« Le purgatoire surpasse en poésie le ciel et l’enfer, en ce qu’il représente un avenir qui manque aux deux premiers. » François René de Chateaubriand, cité par Jacques Le Goff dans « La Naissance du Purgatoire ».

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