Débat sur la stratégie de communication de l’UE : propagande pour l’intégration communautaire ou service public d’information sur l’Europe ?

Au cours de cet été, un think tank suédois, Timbro publie une étude : « Le fardeau de l’Union européenne : informer et communiquer auprès d’un peuple réticent ». Les auteurs soulèvent le problème d’une stratégie de communication visant à promouvoir le succès de l’intégration européenne afin de gagner le soutien populaire à la construction européenne alors même que les citoyens européens ne payent aucune attention à « la révolution démocratique de l’Europe ».

Ainsi, un fossé se creuse entre des citoyens européens souhaitant un véritable service public d’information sur l’Europe et les institutions européennes engagées dans une « propagande » pour l’intégration communautaire.

La Commissaire européenne chargée de la stratégie de communication, la suédoise Margot Wallström, répond sur son blog qu’il convient de nuancer : entre information et propagande, il y a justement la communication, qui repose sur le dialogue entre les citoyens européens et les institutions européennes.

Réquisitoire du think tank Timbro contre la stratégie de communication de l’UE

Le think tank Timbro dans « The European Union’s Burden : Information dans communication to a reluctant people » passe en revue le budget et les actions de communication de l’UE.

D’une part, le budget communication de l’UE est beaucoup plus élevé que le seul budget de la DG Communication de la Commission européenne, s’élevant à 213 million d’euros en 2009 :

  • 124 millions d’euros en 2009 pour le programme « Jeunesse en action » dont les objectifs sont d’« associer activement les jeunes à la société en tant que citoyens, (et de) renforcer leur sentiment d’appartenance à l’Europe » ;
  • 7,5 millions d’euros en 2009 pour le programme d’information sur la monnaie unique de la DG Eco ;
  • 18 millions d’euros en 2009 pour la campagne de communication du Parlement européen pour les élections européennes ;
  • budgets pour des commémorations telles que les 50 ans du traité de Rome en 2007 ou la chute du mur de Berlin en 2009…

D’autre part, les actions de communication de l’UE sont bien plus que de simples campagnes de promotion des réalisations de l’UE, il s’agit d’investissements dans les médias ou la société civile qui visent à influencer ces acteurs et faire passer un message politique pour davantage d’intégration européenne :

  1. Financement de compétitions pour les journalistes traitant des questions européennes et de médias européens comme les réseaux Euronews pour la TV (10,8 millions d’euros en 2009), Euranet pour la radio (6 millions d’euros en 2009), EUTube et EuroparlTV (9 millions d’euros en 2009 pour la webTV du parlement européen) sans compter les Séminaires de formation pour les journalistes (1,8 millions d’euros en 2009)…
  2. Financement de campagnes décrites « de bon samaritain » comme « School Milk Aid » (distribution de lait dans les écoles pour 69 millions d’euros en 2009 soit 305 000 tonnes de lait), « Fruit to School Children » (distribution de fruits frais dans les écoles pour 90 millions d’euros en 2009) ou encore « Help – for a life without tobacco » (campagne anti-tabac auprès des jeunes, 14 millions d’euros en 2007)…
  3. Financement de think tanks créant une « colonisation de la société civile » et formant une opinion globalement favorable à la construction européenne.

Ainsi, la stratégie de communication de l’UE s’oriente vers la création d’une identité européenne au moyen d’un « vaste outil de communication qui se comporte d’une manière qui serait à peine acceptée de la communication publique nationale dans les États membres ».

Plaidoyer de la Commissaire européenne chargée de la stratégie de communication de l’UE

Dans un billet « The silly season », Margot Wallström invite à nuancer :

  1. Le lien entre consultation des citoyens et rejet de l’UE – prouvant le déficit démocratique de l’UE – est loin d’être évident. Depuis 1972, il y a eu pas moins de 35 référenda tenus sur des questions européennes, seulement 9 ont produit des résultats négatifs.
  2. Le lien entre financement d’infrastructures, de services ou d’informations aux médias et influence éditoriale fait fi des règles déontologiques propres aux médias et ne fait pas la différence entre actions de relation presse visant à faire passer un cadrage particulier sur un sujet et actions de promotion visant à faciliter le travail des journalistes sur les questions européennes.
  3. Le lien entre information et propagande – qui seraient les seules possibilités pour la communication européenne – révèle une profonde méconnaissance du métier de communicant de l’Europe, qui repose justement sur le dialogue approfondi sur le souhaitable et le possible avec les citoyens et leurs « corps intermédiaires » qu’ils soient médias, ONG ou Etats.

Ainsi, la responsable de la stratégie de communication de l’UE rappelle que « pour 40 centimes d’euros par personne et par an, la Commission européenne :

  • maintient des représentation dans tous les États membres ;
  • porte des consultations publiques auprès des citoyens ;
  • finance Europe Direct, le service qui répond aux questions des citoyens ;
  • fournit des facilités de studio gratuites pour l’usage des journalistes radio ou TV ;
  • organise des séances quotidienne de questions/réponses pour les journalistes ;
  • offre une couverture des événements publics, une bibliothèque audiovisuelle et des centaines de sites multilingues, notamment interactifs comme Debate Europe ou EUtube ».

Bref, un été particulièrement chaud pour la communication européenne…

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